samedi 21 février 2009

VALA, TABERNACLE D'ALBION


Albion rejette Jérusalem et se laisse séduire par Vala.
Chaque ornement de perfection, et chaque travail d’amour,
Dans tous le Jardin d’Eden, et sur toutes les montagnes dorées
Etaient devenus une horreur enviée et un souvenir de jalousie;
Et chaque acte un crime, et Albion le juge punitif.

Et Albion parla depuis son secret siège et dit:

« Tous ces ornements sont des crimes, ils sont faits par le travail
D’amour, de consanguinités et d’amitiés artificielles
Horribles à concevoir lorsqu’on cherche à en pénétrer le secret, et toutes
Ces collines et vallées sont les maudits témoins du péché.
Je les condense donc en de solides et stables rochers,
Fondation et certitude et vérité démonstrative,
Que l’homme soit séparé de l’homme; et ici je plante mon siège. »

De froides neiges s’amoncelèrent autour de lui; de la glace couvrit ses reins.
Il s’assit près du ruisseau de Tyburn, sous son talon s’élançait
Un arbre mortel - il le nomma Vertu morale*, et la Loi
De Dieu qui demeure dans le chaos, à l’abri de la vue humaine.
L’arbre déploya sur lui ses froides ombres (Albion gémit).
Ils se penchèrent, sentirent la terre alors que s’enracinaient encore
En plusieurs un arbre; un labyrinthe infini de malheur.
Depuis le sacrifice volontaire de soi-même, jusqu’au sacrifice des (mal-nommé) ennemis
Pour expiation Albion commenca à ériger douze autels,
(... ).
Il les nomma Justice et Vertu. Et les fils d’Albion[1]
Auraient du devenir les premiers sacrifiés, ayant été les premiers transgresseurs;
Mais ils fuirent dans les montagnes cherchant le rachat, construisant une solide
Fortification contre l’humanité divine et la pitié,
Dans la honte et la jalousie pour annihiler Jérusalem.

Tournant le dos à la Divine Vision, son Chaos
spectral apparut devant son visage - mémoire informe.
Alors parla le Chaos spectral à Albion, au froid assombrissant:

« Je suis ton pouvoir rationnel, Ô Albion, et la forme humaine
Que tu appelles divine n’est qu’un vers d’un mètre cinquante de long,
Qui rampe au dehors une nuit et est réduit en poudre au soleil du matin. »

Ainsi parla le spectre à Albion (Il est le grand Ego,
Satan, vénéré en tant que Dieu par les puissants de cette terre,
Ayant un point blanc comme centre à partir duquel se ramifie
Un cercle dans une continuelle giration. Ce cercle devient un coeur,
A partir duquel s’élance divers embranchements variant leurs mouvements
Produisant plusieurs têtes - trois ou sept ou dix, et des mains et des pieds
Innombrables selon la volonté de l’infortuné contemplateur,
Qui devient sa nourriture. Tels sont les manières du pouvoir dévorant).

Et ceci est la cause de l’apparence dans le menaçant Chaos.
L’émanation d’Albion, que ce dernier a caché dans sa jalousie,
Apparaît maintenant dans le Chaos menaçant,
Albion dit: « Qui es-tu toi qui te montres en une obscure apparence,
enveloppant la Vision Divine dans les couleurs d’une maturité automnale?
Jusqu’à ce jour je ne t’avais jamais vue ni n’avait contemplé la vie abstraite,
Ni l’obscurité mêlée à la lumière sur les sillons de mon champ.
D’où viens-tu ? Qui es-tu, Ô bien aimée ? La Vision Divine
N’est rien à côté de toi; toute vie et toute joie est fanée »

Vala répliqua dans des nuées de larmes, enlaçant le vêtement d’Albion:

« J’étais une ville et un temple construit par les fils d’Albion.
J’étais un jardin planté avec beauté; J’ai attiré par delà monts et vallée
La rivière de vie pour qu’elle coule contre mes murs et parmi mes arbres.
Vala était la bien aimée fille de l’éternité, (..) offrant à Jérusalem le sacrifice de l’amour fanatique.
Pourquoi aimais-je Jérusalem ?
Pourquoi n’étais-je qu’une avec elle, embrassant la vision de Jésus?
Pourquoi - aimante - créais-je l’amour alors que cet amour
jamais
N’unit Dieu et l’homme - quand toi et moi cachions la Vision Divine
Dans les nuages d’une obscurité secrète dont tu peux voir qu’elle m’entoure de toute part.
Regarde-moi, Albion ! Sache maintenant que je suis la seule beauté;
La forme humaine d’imagination n’est qu’un souffle de Vala.
Du fond de ma secrète caverne, je le propulse dans les cieux,
Né de la femme pour obéir à la femme, Ô puissant Albion.
Car l’apparence divine est fraternité, mais je suis Amour
Elevé par mes rouges flammes aux hauteurs de la fraternité. »

« Es-tu Vala? » répliqua Albion, « image de mon sommeil?
Ô ! comme je tremble, comme mes membres répandent une peur lactée !
Un vêtement de rosée me couvre de toute part, toute humanité est perdue.
A tes mots et à tes regards, des pieds à la tête la mort m’habille d’un habit de peurs et de mort éternelle.
Ce soleil n’est-il pas ton époux et cette lune ton voile scintillant ?
Les étoiles des cieux ne sont-elles pas tes enfants ? N’es-tu pas Babylone ?
N’es-tu point la Nature, mère de tous ? Est-ce que Jérusalem est ta fille ?
Pourquoi t’es-tu élevée vers l’intérieur, Ô toi, habitante des chambres extérieures,
Depuis les grottes et les cavernes sous la lune, pâle région de la mort
Où sous le brûlant midi j’ai posé ma charrue, laissant paître mon chaud attelage,
Où des outils de guerre sont forgés, la charrue qui doit passer sur les nations. »
[1] Auparavant, la famille d’Albion était unie, mais maintenant il devient hostile à ses enfants. Ceux-ci vont être victime d’une fausse théologie d’après laquelle Dieu demanderait des sacrifices pour réparer le péché.

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